Apprendre & Pratiquer le métier d'écrivain

Pourquoi est-ce si dur de corriger son texte

Avant de contacter un éditeur, on se doit d’abord de travailler notre texte, au risque de voir le produit de notre labeur se faire éconduire avec une mission de correction ou essuyer un refus, peut-être poli.

Seconde partie

Afin de modifier le sentiment de corvée souvent lié à la relecture de son texte, il ne faut pas s’y attaquer en connotant négativement l’exigence que cela requiert. Ce n’est pas un devoir qu’on va remettre à un professeur d’une main tremblante en espérant qu’il va remonter notre moyenne du trimestre. Il s’agit avant tout de la finalisation d’un projet qui nous tient à cœur. D’un aboutissement. Franchement, ce n’est pas si près du but que vous allez renoncer à ce à quoi vous rêviez de voir se réaliser, si ? Non. Alors tenez-vous prêt, je ramasse les copies dans deux heures…

Le feu de l’envie, les cendres de la frustration

Bouquet final

Pensez à un artificier s’apprêtant à voir s’élever dans le ciel le bouquet final qu’il aura minutieusement préparé. Avant de voir ses efforts couronnés de succès, il lui faudra vérifier que tous ses systèmes de mises à feu se déclencheront exactement au moment idéal pour obtenir l’effet désiré. Chaque détail comptera afin que l’émerveillement soit total et récompensé par les exclamations de la foule réunie sous la flamboyance de fusées faisant s’esclaffer la nuit de leur fracas coloré. Vous êtes cet artificier, conscient que les efforts consentis feront crépiter dans les yeux du lecteur les lumières de votre imaginaire. Eh oui, la nourriture du corps, c’est label Rouge, celle de l’esprit, c’est la belle bleue.

Un casse-pieds dans le paysage

Si vous ne deviez retenir qu’une chose, hormis le scintillant jeu de mots achevant le paragraphe précédent qui saille tel un balcon luxueux de cet article select, ce serait l’état d’esprit positif qui devra être le vôtre à l’approche de la relecture. Ne soyez pas celui qui, parvenu à l’étage panoramique de l’Empire State Building, se plaint d’avoir dû patienter dans la file d’attente au lieu de profiter du paysage à couper le souffle que lui offre ce bref moment de frustration. Celui qu’on peut sentir peser en subissant un rythme de correction trop lent à notre goût. Celui qui, si on ne s’en méfie pas, peut rapidement devenir le casse-pieds de votre joie de mettre la dernière main à votre texte.

Le parasite de notre attention

Après tout, c’est un sentiment compréhensible : on est si proche, mais les choses n’avancent pas aussi vite que nous le souhaiterions. Vous savez quoi ? C’est précisément cette frustration qui vous ralentira, agissant comme un parasite qui perturbera votre inconscient en le faisant se projeter une page plus loin que celle que vous êtes en train de peaufiner. Une ou dix, d’ailleurs. L’envie d’agir à sa guise au détriment d’une attention constante ne connaît de mesure que ce que le côté rationnel de votre esprit lui impose. C’est pourquoi on doit s’astreindre à une relecture  consciencieuse sans brûler les étapes. Histoire de réduire une fois pour toute cette frustration en cendres.

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Toute fée tout flamme

La paresse est inflammable

Survoler l’orthographe avec dilettantisme, se laisser distraire par des niaiseries du Web ou autres programmes télé débiles au lieu de prendre le temps de modifier ce qui doit l’être pour parfaire son texte sont les signes d’un manque d’implication pouvant sérieusement poser problème. Outre générer de nombreuses sources d’erreurs, cette paresse de s’investir pleinement pointe une vérité gravée dans le marbre : vous ne tirerez le maximum de votre potentiel créatif qu’en donnant le meilleur de vous-même sans vous disperser. Un texte trahit d’office l’attrait coupable pour la procrastination et la façon dont son auteur l’a relu révèle rapidement le recours à la facilité, voire l’esquive d’un véritable effort. Autant d’allumettes que vous tendez aux critiques pour qu’ils descendent votre bouquin en flamme. 

Les fées méticuleuses

Quand on écrit un roman ou une nouvelle, nous ne disposons pas forcément des qualités semblables à celles d’un autre auteur. Et inversement, lui-même ne possède pas certaines aptitudes dont les fées littéraires s’étant penchées sur notre berceau nous ont dotés. Pour autant, il existe bel et bien un domaine dans lequel une égalité se devrait d’exister : celui de la capacité à corriger notre texte. Cela ne fait appel à aucun don particulier si ce n’est celui de la volonté d’accomplir son métier avec méticulosité. Le talent, l’imagination, le style, les idées, etc., n’entrent pas en ligne de compte dans cet exercice particulier qu’est la correction. Celui-ci requiert exactitude, concentration, organisation et, bien entendu, tout le travail en accentuant l’efficacité.

Savoir où l’on va

Il y a des romans dont la structure est très complexe, pour ne pas dire déroutante. En soi, ce n’est pas gênant si l’auteur a parfaitement jalonné son chemin. Cela l’autorise à vous perdre un peu dans ses méandres narratifs tout en sachant précisément à quel moment il lui appartient de vous tendre la main afin que vous retrouviez votre chemin. Il aura pris soin au préalable de disposer avec une précision maniaque des points de repère dans son récit. Autant pour lui que pour vous lorsqu’il débutera son travail de relecture narrative. Cette rigueur suppose le recours à des points forts de son récit n’entrant jamais en contradiction les uns avec les autres. Comment y parvenir ? Laissez-moi vous proposer une méthode parmi d’autres…

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Le hibou funambulesque

Sur le fil

Commencez par établir une liste de tout ce que vous estimez important pour que la compréhension de votre texte tombe sous le sens, même si vous empruntez des détours tortueux Ça ne se fera bien sûr pas du jour au lendemain, même si vous commencez la veille. Mais l’essentiel est qu’à chaque instant vous soyez en mesure de superviser les éléments  grâce auxquels vous aurez une vue d’ensemble de votre structure. Ce balisage d’un point culminant à l’autre sera le fil impeccablement tendu soutenant tout au long du récit l’habile funambule qu’est votre pensée. Je vous épargne le bruitage pour le cas où vous dévieriez de cette trajectoire. Ça m’embêterait de finir ce paragraphe par « Beurk !!! ».

Un problème après l’autre

Une des choses importantes à retenir quand on se relit, c’est que chaque détail vous faisant tiquer doit être examiné dans l’instant. À la seconde où vous le remarquez. Le « J’y reviendrai plus tard » est une source d’oubli. Si vous avez un doute sur l’orthographe d’un mot ou l’accord d’un participe passé, n’allez pas au-delà avant d’avoir consacré le temps nécessaire à la vérification de ce qui vous préoccupe. La durée indispensable à la recherche pour résoudre votre problème de l’instant importe peu : elle sera toujours moindre que celle gaspillée à vous souvenir du passage où se profilait peut-être une erreur, qui risquera par ailleurs de finir aux oubliettes de votre vigilance. Pour plusieurs raisons, dont une purement mécanique : vous serez bientôt happé par une autre faute à laquelle vous attribuerez davantage d’importance. La conséquence directe sera que la précédente passera à l’as une fois sur deux.

Diminuer le temps de correction

Une cause de rallongement du temps de correction tient à un aspect bête comme chou (bijou caillou, hibou, genou, pou, joujou) ; cette petite liste mise entre parenthèses, vous l’avez apprise quand vous étiez mouflet. Ces sept mots se terminant par « ou », et seulement ceux-là, prennent un « x » au pluriel. L’aspect bête comme chou évoqué est que nous nous contentons parfois de corriger la faute sans se rappeler l’exception caractérisant un mot ou comprendre la règle entraînant un emploi fautif de l’orthographe ou de la grammaire. Impossible dans ces conditions de se remémorer avec certitude la forme correcte sans opérer une nouvelle vérification quand l’obligation s’en fait ressentir.

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Des pièges sur notre route

Mais où est donc mon chemin ?

Corriger pour passer à autre chose nous apporte une réponse immédiate, pas un acquis durable. Si, pour aller d’un point A à un point B, nous sommes sans cesse contraints de revenir sur nos pas pour être sûr de se trouver dans la bonne direction, cela nous retardera systématiquement. Un parcours de relecture sera d’autant plus écourté que nous n’éprouverons pas le besoin d’effectuer ces incessants allers et retours pour parvenir à notre but. Il existe des moyens mnémotechniques très efficaces pour se faciliter la vie (« mais où est donc Ornicar » pour mais-ou-et-donc-or-ni-car afin de garder en tête les conjonctions de coordination est l’un des plus « célèbres »).

Transformer la difficulté en évidence

Les moyens mnémotechniques ne sont cependant pas la panacée pour deux causes au moins : certains ne correspondent pas à notre manière naturelle de mémoriser les choses, et le champ des règles qu’ils couvrent est limité. J’entends par-là que si vous buter à tous coups sur un terme ou l’assimilation d’un procédé, vous devrez comprendre son fonctionnement et la logique qui lui est propre, sans quoi d’une fois à l’autre vous serez incapable de reproduire le modèle déductif permettant que cela devienne une évidence au lieu d’une difficulté. Mieux vaut savoir comment un piège s’articule si l’on ne veut pas qu’il se referme sur nous.

Le pied dans la porte

Si l’on estime avec raison qu’il peut être ardu de relire son histoire, on constate aussi que des solutions existent afin de ne pas se noyer dans 10 centimètres d’encre. Je me permets d’insister sur le côté enthousiasmant que peut revêtir ce passage obligé. Il symbolise le dernier pas vers un accomplissement. Toutes ces heures de travail sur un texte, ces longues soirées où le doute s’insinue en nous avec l’assurance de qui coince du pied la porte que tant de fois on a dû lui claquer au nez. Avant qu’il nous susurre d’un ton on ne peut plus persuasif que ce sera très difficile de terminer notre roman…

Ce qui s’oublie et ce qui reste

Puis nous y voilà, au bout du bout. On s’est bagarré d’un paragraphe à l’autre et d’un chapitre au suivant pour enfin recueillir les fruits de notre boulot. Il ne nous reste plus qu’à ôter la moisissure des mots, jeter sans le moindre regret les phrases incomestibles, se débarrasser avec détermination de la pourriture envahissant notre texte : incohérences, bavardages dispensables, idées étalées pour se faire valoir sans qu’elles fassent avancer l’intrigue d’un iota, rythme bancal, grammaire malmenée, orthographe rudoyée, etc. J’ai déjà dit tout ce que ça réclamait de patience et de vigilance. Mettre un point final à une histoire est à ce prix.  Mais souvenez-vous d’une des nombreuses répliques cultes de Les tontons flingueurs : « Le prix s’oublie, la qualité reste. »…