Apprendre & Pratiquer le métier d'écrivain

Retrouvez votre inspiration

Retrouvez votre inspiration. Vous connaissez le plus grand secret des écrivains : la lecture. Voici un article qui met en pratique ce conseil de manière créative et exaltante.

Vous manquez d’inspiration pour vos histoires ? De matériau ? J’avais déjà écrit un article afin de tenter de vous aider à en trouver, et si je récidive aujourd’hui, c’est en raison de deux livres chacun singulier à leur façon : l’un est un gros recueil de nouvelles avec une thématique pour le moins surprenante ; l’autre un petit bouquin qui me paraît en mesure de stimuler l’imagination de toutes et tous en proposant de courts récits extraordinaires au point de penser inimaginable qu’ils soient vrais. Et pourtant…

De l’infiniment petit…

Petit bouquin, grande inspiration

Quand je parle de « petit bouquin », vous l’aurez compris, ce n’est nullement péjoratif. Mais disons que question format, il se rapproche plus de la carte postale que du Larousse 2021 ( qui m’oblige à utiliser un treuil chaque fois que je veux le consulter ; j’exagère à peine). Ajoutons à cela que ce mini-livre compte un peu plus d’une soixantaine de pages dont un tiers de (magnifiques) illustrations, et vous aurez une idée de la « chose ». Je vous vois déjà vous gratter la tête l’air perplexe en vous disant : « Quoi ? Cet ouvrage lilliputien d’à peine quarante pages de texte serait censé fertiliser mon esprit ? Une arnaque, oui ! ». Eh bien non. Car comme vous le savez, ce n’est pas la taille qui compte…

L’Indien, la Chinoise et l’Arménien

Vous voulez connaître l’impensable exploit d’un Indien, modeste ouvrier de son état ? Découvrir l’incroyable courage d’un champion de natation arménien ? Savoir comment une péripatéticienne chinoise brava l’empire du Milieu ? Vous trouverez ces histoires et dix-sept autres dans 20 inconnus au destin hors du commun dont vous n’avez jamais entendu parler avant. Oui, je sais, le titre a l’air presque plus long que ce que l’ouvrage raconte, mais croyez-moi, il vaut le coup ! Vraiment, c’est une mine d’or pour qui cherche un point de départ à une histoire, ou à y insérer une anecdote relative à l’un de ses fabuleux destins (sans l’obligation de vous appeler Amélie, c’est dire !). Un point de départ, une anecdote, certes, mais jusqu’à quel point est-ce une aide ?

Donnez du culot à votre imaginaire

En fait, il arrive qu’on veuille raconter une histoire qu’on pourrait taxer d’invraisemblable et que pour cette raison on n’ose pas pleinement exploiter notre idée de départ. Pour être clair : on s’impose des limites par crainte d’être ridicule. Je ne dis pas qu’on soit à court en matière de situations insolites ou de personnages extravagants, et qu’il ne soit pas possible de s’y référer pour crédibiliser notre propos. Mais 20 inconnus… a ceci de stimulant qu’en dépit de la brièveté des histoires qu’il recèle, elles permettent à mon sens de donner du culot à notre imaginaire au regard de leur côté très marquant et indubitablement extraordinaire. Je veux dire par là qu’une fois sorti de sa minuscule cachette, ce livre a de quoi décomplexer quiconque s’attaque à un texte réclamant une importante suspension consentie de l’incrédulité chez le lecteur.

…À l’infiniment grand

900 mètres d’imagination

C’est pourquoi je recommande 20 inconnus… non seulement pour sa valeur intrinsèque, mais aussi parce que ceux qui en prendront connaissance trouveront là de quoi débloquer pas mal de freins qui ralentissaient jusque-là leur progression. Je vais vous fournir un exemple connu sur lequel un auteur pourrait éventuellement s’appuyer pour faire admettre l’inconcevable à son lecteur. Je précise qu’il ne figure pas dans notre petit bouquin, car il serait dommage de dévoiler la particularité d’un seul de ces destins hors du commun. Alors imaginons que pour les besoins de votre histoire, l’un de votre personnage réchappe d’un crash d’avion après une chute libre sans parachute de 900 mètres. Totalement aberrant, n’est-ce pas ? Vraiment ?…

La traversée verticale du ciel

Pourtant, en 1972, c’est bien ce qui est arrivé à Vesna Vulovic, une hôtesse de l’air serbe éjectée d’un DC-9 ayant explosé en plein vol à environ mille mètres d’altitude. Bien sûr, elle n’est pas sortie indemne de ce terrible accident (ou attentat), mais elle a survécu et a même repris du service plus d’un an après pour une autre compagnie. À noter qu’une première estimation à l’époque du crash lui a valu d’entrer dans le Guinness Book, car on a à ce moment-là évoqué un saut dans le vide de plus de dix mille mètres ! Ce record a bel et bien été validé, et quel que soit le chiffre exact, ce qu’il faut retenir est le caractère totalement improbable de ce fait même si l’on ne considère comme réel au minimum « qu’un » kilomètre de traversée verticale d’un humain dans le ciel. Pour rappel, sans parachute.

S’adosser à la réalité

Pour en revenir à l’usage possible d’une telle information dans le cadre d’un roman ou d’une nouvelle, songez que le méchant de votre histoire pourrait effectuer un pareil vol plané. Le héros serait alors sûr et certain d’être définitivement débarrassé de son ennemi juré en apprenant sa présence à bord d’un avion ayant fait un crash… Mais un an et demi plus tard, coucou le revoilà ! Effet de surprise garanti (pour le héros comme pour le lecteur) ! Il vous sera alors facile en faisant mention de la mésaventure de Vesna Vulovic de ne pas passer auprès de votre lecteur pour un auteur écrivant n’importe quoi. S’adosser à la réalité confère de la véracité à  ce qui ne semblait pas envisageable. Dans le métier qui est le nôtre, être cru est le meilleur moyen de ne pas être cuit ! 

Hôtesse de l’Ère

L’hélice d’une histoire

J’en viens maintenant à Classe tous risques, le recueil de nouvelles évoqué dans mon introduction. J’avoue ne pas l’avoir encore terminé, mais je suis presque arrivé en bout de piste, s’agissant d’un livre dont toutes les histoires ont pour point commun de se dérouler… dans un avion ! Je n’irai pas jusqu’à réclamer des applaudissements pour avoir si habilement opéré cette magnifique transition avec les deux paragraphes précédents, mais comme d’habitude, vous pouvez effectuer des dons en espèces afin de saluer ce bel effort. Ou tout simplement faire tourner l’hélice de cet article bimoteur afin de parvenir à sa conclusion qui vous mènera peut-être vers une Ère qui ne sera pas de tout repos !

L’épouvante limitée

Comme je sens qu’il est temps de prendre un peu de hauteur, laissez-moi vous embarquer à bord de ce livre non seulement étonnant par sa thématique, mais aussi par la richesse et la diversité avec laquelle elle a été traitée. D’abord, il vous faut savoir que cette quinzaine de textes ont été réunis à l’initiative de Stephen King et de Bev Vincent, King amenant les premiers milliers de litres de kérosène afin de faire décoller cet appareil littéraire, Vincent se chargeant du ravitaillement en vol, soit de compléter la liste soumise par le Maître de l’horreur. Apparemment, ç’a n’a pas été sans peine, car comme l’indique Vincent dans la postface, comparé à son voisin de palier filmique, « Le sous-genre des nouvelles d’épouvante en avion est bien plus limité, je m’en suis rendu compte. »

Les passeports inutiles

Ah oui, j’avais oublié de mentionner ce détail : c’est un recueil clairement orienté vers des genres tels que l’épouvante, donc, mais aussi le fantastique, l’horreur, la science-fiction, bref, tout ce qui se prête à occasionner des turbulences dans un récit. Quelques-uns des passagers de cet ouvrage voyagent ou ont voyagé depuis longtemps en classe affaires de la littérature : Richard Matheson, Dan Simmons, Stephen King, Joe Hill, Arthur Conan Doyle (eh oui, comme si Sherlock Holmes avait un jour enquêté au-dessus des nuages). Puis ceux que je ne connaissais pas et dont le talent les aurait autorisés à prendre les commandes du cockpit : E. Michael Lewis, avec sa nouvelle La cargaison, m’a saisi ; E. C. Tubb, auquel on doit au propre comme au figuré une trouvaille diabolique ; John Varley, qui m’a scotché par son inventivité… et bien d’autres. De quoi là aussi donner son envol à votre inspiration tant sont variées les façons d’aborder ces huis clos pas comme les autres…

Si jamais vous lisez ces deux bouquins, préparez-vous à d’étranges voyages. Soyez tranquilles (ou inquiets ?), on ne vous réclamera pas votre passeport. Comme l’aurait dit Rod Serling du fond des années soixante, ils ne vous serviront à rien dans la quatrième dimension…

Références

20 inconnus au destin hors du commun dont vous n’avez jamais entendu parler avant Ed. AAARG

Patrick Baud & Guen Tomahawk

Classe tous risques Ed. Le livre de poche

Stephen King et Bev Vincent

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