Apprendre & Pratiquer le métier d'écrivain

S’inspirer des auteurs talentueux pour commencer à écrire

Un auteur débutant se demandant par où commencer pourrait avoir la tentation de s’inspirer des auteurs qu’il connait et affectionne.

Quand à ses débuts on espère acquérir un bon niveau d’écriture, il est normal d’avoir pour repères les écrivains qui nous émerveillent par l’élégance de leur plume, l’habileté avec laquelle ils bâtissent une intrigue, le côté incisif des dialogues dont ils usent avec justesse ou l’épaisseur psychologique de leurs personnages. Entre bien d’autres qualités. Mais, au grand damne des auteurs en herbe ou de ceux plus expérimentés cherchant sans cesse à s’améliorer, un constat d’une infinie cruauté s’impose à tous : il est plus facile de voler tout l’or de Fort Knox que de piquer le talent d’un autre. Vraiment ? Dans cet article, nous allons tout de même tenter de percer quelques coffres-forts, au cas où il serait malgré tout possible de récolter des piécettes littéraires…

Imiter ou s’inspirer ?

Droit de passage dans l’art

La tentation paraît aussi naturelle qu’inévitable : aux balbutiements de notre style, lorsque rien n’a pris sa forme définitive dans notre écriture, on s’imprègne des lectures faisant notre bonheur. Il ne s’en dégage aucune marque de fabrique durable, rien ne s’installant avec la profondeur nécessaire dans nos textes pour y laisser une véritable empreinte. Telle phrase évoque vaguement Machin, tel procédé narratif rappelle de très loin Bidule, seulement la photo sur notre carte d’identité textuelle demeure désespérément floue. Ce n’est pas nous. L’écrivain qu’on imite nous laisse un étroit droit de passage dans les vastes champs de son art, mais ce qu’il y a de plus intéressant à y cueillir reste hors de notre portée.

Dans les fossés du talent

Musarder dans ces territoires littéraires dont l’air nous enivre n’est cependant pas improductif. On se gorge des fragrances de l’excellence, du parfum des écrits dont la sensualité lexicale nous séduit. Si ces précieuses senteurs sont volatiles, leur pouvoir stimulant est bien réel en dépit de l’impression que l’essence des meilleurs textes nous glisse encore entre les doigts. On se rend compte du caractère éphémère de ces bouffées inspirantes lorsque, seul devant notre écran ou notre feuille blanche, on peine à en restituer la magie. Comme si l’étonnante facilité avec laquelle nous avions traversé des étendues de papier éblouissantes devenait un trajet ardu dès que nous tentions d’emprunter notre propre chemin. Comme si nous étions englués dans les fossés bordant le talent.

Le calque et le dessin

L’imitation, c’est reproduire grâce à un calque. L’inspiration, c’est dessiner par la grâce du geste acquis. C’est la différence entre la copie d’un modèle et la création personnelle rendue possible par son étude attentive. Ne vous contentez pas de lire vos auteurs préférés ; comprenez-les. Écrire « à la manière de » est une excellente base de travail. Elle vous assouplit l’esprit en même temps que cela le rend perméable à la substance d’un texte. Le calque d’abord, pour tracer les contours les plus visibles. Ensuite, le dessin à main levée afin d’entrer dans le détail, de fignoler. Voyons d’abord comment se procurer notre calque littéraire.

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Trouver les techniques et savoir quoi en faire

Les stores de la littérature

Pour repérer des techniques littéraires, il faut savoir qu’elles existent. Puis, de quelle façon il nous est loisible de les faire nôtre, de les articuler pour servir notre discours. Voire de les tordre pour gagner en originalité. Ainsi, ce petit truc en plus qui vous a conquis chez Machin, il est possible que vous le retrouviez sous une forme légèrement modifiée sous la plume de Bidule. Aussi bien qu’eux, à force d’écarter les lignes des livres comme les volets d’un store, vous découvrirez un paysage de procédés, une vue imprenable sur des boulevards de savoir-faire dont vous ne perceviez alors que confusément l’existence. C’est votre calque, celui vous permettant de discerner le métier de l’écrivain à travers ses livres.

Apprendre à fabriquer sa lampe

Chacun possède une approche personnelle d’une œuvre, et il est profitable de se forger son avis sur la manière dont elle est construite. Cependant, aussi observateur soit-on, il est difficultueux d’en avoir une vision éclairant le moindre de ses rouages sans le regard d’un professionnel habitué à en décortiquer le mécanisme. Une personne en mesure de nommer une figure de style ne vous sera d’aucune utilité si elle s’avère incapable d’en expliquer le fonctionnement, la mise en place et l’intérêt. Quelqu’un se limitant à relever la puissance d’une narration ne vous sera d’aucun secours si elle ne connaît pas tous les ressorts d’une structure efficace et comment les tendre jusqu’à leur point de tension le plus élevé. Bref, vous dire que tel écrivain est un génie sans vous aider à fabriquer votre propre lampe ne vous apportera aucune aide concrète.

Les savoirs complémentaires

 On peut trouver des avantages différents selon les très bons auteurs sur lesquels on se penche. Soit parce qu’ils sont extrêmement pointus dans certains domaines et reconnus en tant que tels. Soit, sans être considérés comme en étant des spécialistes, ils maîtrisent de nombreux procédés leur permettant d’élaborer des histoires d’une grande valeur littéraire. Ces nuances plus ou moins prononcées d’un écrivain à l’autre sont autant d’éléments donnant sa complémentarité à un apprentissage basé sur leurs travaux respectifs. À ce titre, moins le débutant s’enferme dans un type de lecture, tout en conservant ses genres de prédilection, plus ses chances de progresser augmentent de par la variété de ses découvertes.

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Rêves et envies

Bonne nuit ?

S’il fallait dégoter des points communs à des écrivains aux méthodes contrastées, mais tous pourvus d’atouts non négligeables, et dont un auteur en herbe ferait bien de s’inspirer, je citerais le goût du travail, la curiosité, la remise en cause et l’exigence. Dit autrement : ne pas rechigner devant l’effort, avoir l’envie d’apprendre, rester humble quel que soit son niveau et ne pas se contenter de ce que l’on peut améliorer. Pour le reste, dites vous que les qualités non encore acquises ne sont au fond que des défauts qu’il nous revient de corriger ou des prédispositions à l’état de friche. Si en prendre conscience vous permet de mieux dormir, bannissez au moins un rêve de votre sommeil : vous ne ferez pas l’économie des points communs évoqués ci-dessus si vous désirez réellement que l’écriture change votre vie.

Une lucarne dans l’esprit

Au-delà des apports techniques liés à la lecture, l’analyse, la reproduction, la dissection pour ainsi dire de textes provoquant notre admiration, certains écrivains déclenchent en nous ce qui nous accompagnera dans toutes les circonstances de notre vie : l’envie d’écrire. Entre élan mystique et tempête cérébrale, mouvement perpétuel de l’imagination et appétit inattendu de mots, cette envie se manifeste à la façon d’une connexion parfois inexplicable s’imposant telle une évidence. Quand ça m’arrive, j’ai l’impression qu’une clarté nouvelle et pourtant familière irradie en moi, faisant scintiller mes pensées d’une joie lumineuse. Comme si, lisant mes auteurs préférés, je découvrais une pièce secrète dans une maison que j’habitais depuis un demi-siècle et y ouvrais une lucarne où s’engouffre ma fraîcheur d’esprit ravivée par l’appel d’air des phrases des autres.

La cavale du lecteur

L’une des libertés d’un lecteur est d’être en cavale de l’ordinaire. Une évasion tant rêveuse que poussant à faire soi-même rêver les autres si d’aventure le cœur de celles et ceux dévorant des bouquins rougeoie aussi du feu sacré de l’écriture. Pour autant, parmi ceux-là, tous n’ont pas le désir ou la prétention de faire miroiter dans leurs écrits des reflets enchanteurs. La littérature s’honore de ses contrastes, et l’auteur effectuant ses premiers pas dans cet univers si singulier qu’il peut contenir des mondes en un mot en est le premier bénéficiaire. Alors lisez mille auteurs, ce seront autant de lucarnes qui laisseront passer le souffle portant à incandescence les braises de votre imagination…