Apprendre & Pratiquer le métier d'écrivain

Vous ne devinerez jamais à quoi leur servait l’écriture !

Vous êtes loin de soupçonner tous les usages de l’écrit. Remontons dans le temps, au moment  de la naissance de l’écriture jusqu’à l’époque des pharaons. Vous allez être surpris !

La naissance de l’écriture

Les chiffres avant les lettres

L’invention de l’écriture remonte à cinq mille ans. « L’écriture naît presque en même temps dans la seconde moitié du IVe millénaire avant J.C. en Mésopotamie et en Egypte dans les société en plein développement où l’essor du commerce au bord des fleuves et l’urbanisation font apparaître de nouveaux besoins : celui de la liste comptable, du répertoire, de la trace administrative, de la marque de propriété. L’écriture fixe et enregistre, pose des repères, indiquent des bornes, elle fonde l’ordre social et politique, garantit le pouvoir de quelques-uns. » L’aventure des écritures, Naissances, Ed.  B.N.F.
La naissance de l’écriture n’a donc pas été un geste d’amour mais un acte de commerce ! Qu’on se le dise : nos ancêtres étaient plus pragmatiques que poètes.

L’usage avant le mot

L’usage de l’écriture a existé bien avant la création du mot dans un dictionnaire. Le mot écriture est issu du latin scriptura. Il revêt tout d’abord une signification sainte et s’emploie plus largement dans le sens d’inscription, puis de document. Il faut attendre le XVe siècle pour que l’écriture acquiert une dimension de création : créer par le langage, l’art d’écrire. Au XVI siècle il devient un terme de droit « Ce qui est écrit » et acquiert la valeur d’une preuve. Au pluriels, au 18e siècles, les écritures désignent des écriture comptables. Comme quoi, le singulier est tout de suite plus sympathique !
Source : Dictionnaire Historique de la langue française
De Alain Rey

De l’aide-mémoire  au don divin

Les Mésopotamiens se servaient de l’écriture avant tout comme un aide-mémoire alors que les égyptiens sont à l’origine d’un système graphique capable de tout exprimer, notamment ce qui n’existe pas dans la réalité comme des idées abstraites ou la transmission de savoir-faire.

Selon la mythologue égyptienne, c’est le dieu Thot qui a inventé l’écriture et qui l’aurait donné ensuite aux hommes. Le mot « hiéroglyphe » signifie d’ailleurs « écriture des dieux ».

« L’écriture a permis aux anciens Égyptiens de consigner leur propre histoire, d’établir des listes de leurs souverains, de raconter des événements importants, mariages royaux ou batailles.
En Egypte, comme partout ailleurs, l’histoire naît avec l’écriture en plaçant pour la première fois les événements dans un cadre chronologique. Mais elle sert également à la comptabilité, comme les premiers Sumériens, à établir des règles juridiques, à rédiger des contrats de vente de biens et des contrats de mariage. Elle est également le véhicule de la littérature. La littérature égyptienne est d’une extraordinaire richesse ; elle allie les genres les plus divers : maximes de morale, hymnes aux dieux et aux rois, contes historiques et romans d’aventures, chants d’amour, poésies épiques et fables. »
p.31 L’écriture mémoire des hommes, Georges Jean, Découvertes Gallimard

 

Des pratiques anciennes et oubliées de l’écriture

Plus que n’importe quel peuple, les Égyptiens ont utilisé les ressources de l’écrit dans tous les actes de leur vie, notamment dans la magie et dans leur communication avec les dieux. Leur rêve : accéder à l’immortalité.

Le pouvoir de création de l’écriture

Les Égyptiens pensaient qu’il suffisait de nommer, de représenter avec des signes un être, une chose pour qu’ils se mettent à exister et à vivre. En formant les idéogrammes « oiseau », il devenait ainsi bien réel et vivant. Il en allait de même pour toutes les autres formes d’expression et de représentation comme les statues, substituts de pierre d’une personne.

L’écriture existait à l’époque précisément parce qu’elle était magique. Si seulement 5 % de la population savait écrire. Les élites au service de la population permettaient aux Egyptiens d’utiliser cette technique pour trouver des réponses à leurs questions et faire taire leurs peurs.

Ecrire pour devenir immortel

Dans les chambres funéraires, les visiteurs sont frappés encore aujourd’hui de voir à quel point l’écriture et les fresques ont envahi les murs. Elles n’étaient pas faites pour être vues mais pour fonctionner seules de telle manière que les morts continuent à être alimentés par les vivants ou leurs substituts, et que les Dieux leur rendent visite trois fois par jour. L’ultime et deuxième mort était pour eux l’oubli.

C’est pourquoi Osiris est si souvent présent. Des stèles de pierre représentent de la nourriture et il suffit au visiteur de faire couler de l’eau sur elles pour qu’elles se chargent de toutes les denrées contenues dans l’écriture. L’eau récupérée selon des procédés ingénieux nourrissait le défunt.

Lors d’un décès, il était inscrit dans le temple ce qu’il devait se passer en ces lieux. Les fresques indiquaient les rituels à pratiquer, les actions à mener, ainsi que les professions de foi du défunt pour convaincre le tribunal divin de ses bonnes actions. Le livre des morts indiquait quant à lui comment revenir à la lumière dans le pays des vivants. Il s’agissait d’un véritable guide Michelin permettant de passer d’un monde à l’autre et d’être la journée au bord du Nil avant de retourner dans le monde obscur.

Ecrire pour se soigner et vivre mieux

Les maladies graves étaient également traitées par l’écriture de papyrus ou l’inscription dans des pierres. De l’eau était versée dessus pour y recueillir la réponse de la divinité invoquée et était ensuite administrée au malade. Boire le texte constituait une pratique courante pour guérir.

Ecrire était aussi une manière d’infléchir le destin à son avantage. Ainsi pour capturer le cœur d’une personne convoitée, il suffisait d’écrire son nom sur une planchette de bois pour qu’elle puisse progressivement pénétrer son univers.

Vaincre ses ennemis

L’envoûtement faisait partie du quotidien et au plus haut niveau de l’Etat, le roi s’en servait pour combattre ses ennemis et le faisait savoir en haut lieu pour provoquer leur peur. Les insultes accompagnaient ce type d’écrit et côtoyaient une longue liste de malédictions. Des statuettes de cire et de pierre ligotées exprimaient les intentions royales de les réduire à néant.

Une culture littéraire aussi riche qu’inconnue
Ecrire de la poésie, des romans, des contes faisaient également partie de ces pratiques magiques puisqu’il s’agissait de créer des univers. Peu connues, les traductions de Pascal Vernus, la poésie amoureuse de Bernard Mathieu ou les ouvrages de Claire Laloutte permettent d’accéder à ces richesses.

Une littérature sans ego

Il n’y avait pas à l’époque d’auteurs, car les Égyptiens pensaient qu’il était impossible de s’approprier des mots qui appartiennent à tout le monde. Toutes les œuvres portaient le nom du roi, qui comme chacun sait, était une divinité sur terre. L’essence de l’écriture était pour eux d’origine sacrée. Elle est le lieu de rencontre et de dialogue entre les hommes et les Dieux.

 

De vous à moi…

Nous trouvons parfois des astuces pour profiter des multiples bienfaits de l’écriture. Je vous vous invite à faire cette expérience surprenante.

Vous connaissez l’écriture automatique ? Il s’agit d’écrire tout ce qui passe par la conscience sans vous arrêter et sans censure. Outre les surprises qui surgiront en vous relisant, si vous persistez pendant 10 minutes, vous allez voir que votre esprit va se focaliser sur un seul sujet. De lui-même, il va structurer ce qui partait dans tous les sens. Une idée va s’imposer d’elle-même canaliser les flots de vos pensées.

Cette stratégie s’avère utile pour évacuer des émotions fortes ou encore lever des blocages lorsque l’on doit aborder un sujet ardu ou encore lorsque l’on reste paralysé par l’ampleur de la tâche à accomplir… Essayez !

Et vous ? Utilisez-vous l’écriture de manière surprenante ? Exprimez-vous en laissant un commentaire à la fin de cette page ! Au plaisir de vous lire.

 

Sources

Le dictionnaire amoureux de L’Egypte pharaonique, Pascal Vernus

Les premières cités et la naissance de l’écriture : Actes du colloque du 26 septembre 2009, Musée archéologique de Nice-Cemenelum Broché – 9 février 2011

L’aventure des écriture, naissances. Edition de la BNF

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